Ce reportage tentera de nous en apprendre un peu plus sur les différentes étapes par lesquelles passent les personnes atteintes de dédoublement de la personnalité, cette maladie mystérieuse qui n'est apparu pour la première fois dans un manuel de diagnostic médical qu'en 1980.
Pour ce faire, quatre cas différents nous seront présentés, chacun d'entre eux devant mettre en évidence l'une de ces étapes.
Nous commencerons donc par la première, soit l'apparition de la maladie, également appelée « dissociation », à laquelle sera attribuée le cas de Garry, un homme de 40 ans, propriétaire d'une ferme laitière dans le Wisconsin qui, par une froide matinée d'hiver 1988, se réveilla en ayant brusquement changé de personnalité.
Sa voix était subitement devenue beaucoup plus légère...mais le changement ne s'arrêtait pas là ! Étrangement, il paraissait plus féminin ce qui ne tarda pas à fortement inquiéter sa femme Kathryn qu'il avait épousé 20 ans plus tôt... et ce qu'elle le vit faire par la suite ne fera qu'amplifier son malaise...
Garry, au lieu de revêtir ses propres vêtements, choisit délibérément d'utiliser ceux de sa femme ! Il était devenu Mary qui ne tarda à vouloir mener sa propre existence délaissant son ancienne famille.
Les médecins qui suivirent ce cas pensèrent que c'est la perte de sa fille survenue en 1982 qui poussa Garry à utiliser ce mode de défense qu'est le dédoublement de la personnalité. Mode de défense qui était resté en sommeil jusqu'à ce qu'une autre tragédie ne soit définitivement venue le réveiller. La veille de la « transformation » de Garry, des médecins avaient établi que sa femme souffrait d'un cancer aux ovaires.
Il s'avéra rapidement que ce diagnostic était faux, mais c'est bien cette peur de perdre à nouveaux un être cher qui l'obligea à se réfugier derrière la personnalité de Mary. Il fallut ensuite à Garry plusieurs années pour refaire surface et reprendre sa vie en main. Heureusement, il avait toujours pu compter sur le soutien de sa famille avec laquelle il continue aujourd'hui de vivre paisiblement.
Nous passerons ensuite au cas de Valérie Durkin qui mettra en évidence l'étape du traitement et nous montrera comment une thérapie mal orientée peut amplifier la maladie. À la suite de plusieurs tentatives de suicide, Valérie, tout d'abord déclarée maniaco-dépressive par les médecins d'une clinique de santé mentale située en Arizona, s'était vu prescrire de nombreux médicaments inadaptés qui n'avaient fait que lui embrouiller toujours un peu plus l'esprit.
Elle profitait des quelques sorties qui lui étaient concédées par les médecins, pour rejoindre avec bonheur les bancs de l'université. Elle s'y fait quelques amis qui furent surpris de la voir devenir brusquement suicidaire pendant une soirée qui leur avaient pourtant été à tous très agréable. Choqué par cette attitude étrange, l'un d'eux décida de l'emmener d'urgence à l'hôpital afin de l'y faire consulter un médecin. Ce dernier pu tout d'abord observer Valérie se comporter comme une petite fille avant de ne la voir redevenir elle-même.
Aussitôt, il pensa à un cas de dédoublement de la personnalité, mais n'étant pas un spécialiste dans ce domaine il préféra faire confirmer son diagnostic par un psychiatre de Philadelphie. Ce dernier affirma que Valérie présentait réellement toutes les caractéristiques de la maladie. Elle passa donc les trois années suivantes dans un programme intensif pour patients externes où l'utilisation d'une thérapie basée sur l'hypnose ne fit qu'amplifier son problème. C'est ainsi qu'en lui faisant se remémorer les mauvais traitements qu'elle avait subi pendant son enfance, que cette thérapie fit apparaitre en elle, pas moins de 50 nouvelles personnalités. Pour s'en défaire, Valérie dut ensuite attendre que son médecin s'aperçoive enfin que certains de ses souvenirs n'avaient été généré que par l'hypnose et qu'ils n'étaient par conséquent par réels. Cet exemple montre bien à quel point le processus de guérison dépend du travail du médecin et comment une mauvaise orientation de la thérapie peut devenir désastreuse pour le patient.
Viens ensuite l'étape de la guérison, aussi appelée « l'intégration », que nous comprendrons un peu mieux en suivant l'histoire de Chris Sizemore, la véritable héroïne du livre et du film nommés « les trois visages d’Ève ». C'est d'ailleurs grâce à ce cas que le monde prit enfin connaissance de l'existence de cette étrange maladie de l'esprit. Ce sont trois grandes expériences traumatisantes qui menèrent Chris à développer le dédoublement de la personnalité. Le premier se déroula lorsqu'elle n'était âgée que de deux ans. C'est alors qu'elle contempla avec effroi le corps d'un homme noyé qu'on extirpait d'une rigole. Quelques semaines plus tard, se fut la vision d'un homme coupé en deux dans une scierie qui la fit à nouveau connaître la terreur. Ces drames avaient définitivement préparé le terrain de la maladie qui n'apparut réellement que lorsqu'elle assista peu de temps après à un accident dans lequel était impliqué sa mère.
C'est à ce moment très précis que sa véritable personnalité s'effaça, faisant place à une autre. Elle vécut ainsi, passant d'une personnalité à l'autre pendant plus de 40 ans avant de pouvoir enfin trouver la guérison. Cette dernière lui fut confirmée dans un rêve dans lequel elle vit chacune de ses autres personnalités s'effacer progressivement. Son subconscient venait de lui envoyer un signal très clair, elle était désormais capable de contrôler sa vie.
Pour finir, nous nous attarderons sur le cas très controversé de Sybil, de son vrai nom Shirley Ardelle Mason, qui nous permettra de comprendre à quel point il peut être délicat de diagnostiquer cette maladie. Le grand public prit connaissance de l'histoire de Sybil grâce au livre éponyme paru en 1973.
Il racontait la vie d'une étudiante en art de l'université Colombia de New York, Flora Rheta Schreiber de son vrai nom, qui avait subi tellement d'abus pendant son enfance qu'elle s'était mise à développer 16 personnalités distinctes. Ce livre rencontra un succès tel, qu'il fut dès 1976 adapté en une mini-série télévisée. L'histoire aurait pu s'arrêter là si un historien en psychanalyse nommé Peter Swales n'avait pas décidé en 1998 de ré-étudier ce cas. Sa conclusion fut surprenante, Sybil n'aurait, selon lui, jamais souffert de dédoublement de la personnalité et n'aurait fait que répondre aux attentes de son médecin. Le psychiatre Herbert Spiegel qui remplaçait la thérapeute habituelle de Sybil lors de ses congés, était également parvenu à la même conclusion. Il déclara également s'être vu proposer de devenir co-auteur du livre s'il acceptait de prétendre que Sybil souffrait réellement de dédoublement de la personnalité. Son professionnalisme l'a bien sûr poussé à rejeter cette offre. De nombreux spécialistes qui se penchèrent par la suite sur ce cas épineux émirent quant à eux la conclusion que Sybil ne faisait que prétendre qu'elle ne souffrait pas de cette maladie et cela uniquement pour plaire au Docteur Spiegel qui rejetait cette idée.
Tous les protagoniste de cette histoire étant morts aujourd'hui, nous ne connaîtrons donc probablement jamais le fin mot de tout ceci.
À l'heure actuelle, les psychiatre ne sont toujours pas parvenu à percer les mystères de cette étrange maladie. À vrai dire il n'y a que très peu de choses dont ils sont sûrs.
Premièrement, les personnes qui l'ont développé ont toutes subi un traumatisme répété pendant leur enfance. Deuxièmement, sur près de 40 000 cas recensés, pratiquement tous ont été diagnostiqués en Amérique du Nord.
